Donald Trump s’entête, tourne en boucle.
A trois semaines de l’élection, et en dépit de sondages alarmants, le président américain refuse obstinément de changer de posture ou d’adopter des accents plus rassembleurs, en particulier face à une crise sanitaire hors norme.
Celui qui se targue d’avoir été élu à sa première tentative à la Maison Blanche sans avoir jamais auparavant brigué aucun mandat voit se profiler le 3 novembre avec inquiétude. Mais ne bouge pas d’un iota.
Recroquevillé sur sa base, sourd aux mises en garde sur une possible débâcle, il reste enfermé dans la nostalgie de 2016, où il avait créé l’une des plus grandes surprises de l’histoire politique américaine.
Certes, l’énergie du tribun est toujours là. Il a repris cette semaine la route avec une fougue spectaculaire une semaine après son hospitalisation en raison du Covid-19.
Face à une foule comme toujours enthousiaste il a même esquissé deux soirs de suite quelques déhanchements au son de YMCA de Village People (“Young man, there’s no need to feel down, I said, young man, pick yourself off the ground”).
Mardi, à Johnstown, petite ville de Pennsylvanie, pour son deuxième meeting post-Covid, il a récité dans le froid automnal sa partition archi-connue.
Il dresse le même tableau apocalyptique d’une Amérique qui, à l’écouter, s’enfoncerait dans le chaos et la récession et deviendrait “un Venezuela à grande échelle” si un démocrate venait à lui succéder dans la Bureau ovale.
Les propos moqueurs et les insultes sur Joe Biden pleuvent. “Il n’a pas la moindre idée de ce qu’il dit!”. “Il est grillé, et ce n’est pas un type bien”. “Même dans ses meilleures années, il était considéré comme stupide”.
Le Covid-19, qui a fait plus de 215.000 morts aux Etats-Unis?
Son discours se résume à deux messages principaux: C’est presque fini (“Les vaccins arrivent bientôt”, “Nous allons écraser ce virus très rapidement”), et votre président a terrassé le virus (“Je l’ai eu, et me voici”).
Sur son programme pour les quatre années à venir, rien ou presque au-delà de la traditionnelle envolée finale que tout le monde connait pas coeur et reprend à l’unisson.
“Nous allons continuer à nous battre, et nous allons continuer à gagner, gagner, gagner!”.
Après avoir quitté la scène, il vante immanquablement la taille des foules qu’il mobilise par rapport à son adversaire “endormi”. Mais si le show garde de son attrait, ce seul critère de mesure est-il toujours aussi pertinent, quand son adversaire a lui décidé de se tenir à l’écart des grands rassemblements pour des raisons sanitaires?
– “Suicide politique”? –
Quand il n’est pas sur les estrades, c’est Twitter qui lui sert d’exutoire. Sans le moindre sondage favorable à se mettre sous la dent, il ne cache pas sa frustration.
Il se montre irritable, même contre Fox News, qu’il continue à fréquenter assidûment pour de longs entretiens téléphoniques décousus, mais dont il attend une couverture plus flatteuse.
Il se perd dans des théories du complot – en particulier sur un scandale de corruption qui viserait Barack Obama – auxquelles plus personne ou presque ne prête attention.
L’Amérique est-elle en train d’assister à un “suicide politique” qui prend des allures de “télé-réalité surréaliste”, comme le suggérait il y a quelques jours David Axelrod, ancien conseiller politique de Barack Obama?
Rien n’est encore joué.
Les trois dernières semaines de campagne pourraient apporter leur lot de surprises et de rebondissements.
Mais l’inquiétude est là dans le camp républicain. L’hypothèse d’une victoire écrasante de Joe Biden gagne en épaisseur.
Les propos du sénateur républicain Ted Cruz, évoquant le spectre d’un “bain de sang” pour le “Grand Old Party” ont marqué les esprits.
Les élus républicains du Congrès dont le siège est en jeu le 3 novembre, à la Chambre des représentants et au Sénat, ne se bousculent pas pour revendiquer leur attachement à Trump.
Le fait qu’il ait lui-même été touché par le Covid-19 lui offrait une occasion inespérée de changer de ton dans la toute dernière ligne droite. De faire enfin preuve d’empathie, de trouver les mots pour dire l’angoisse que suscite ce virus. Il ne l’a pas saisie.
“L’un des trucs quand vous êtes président c’est que si vous ne sentez pas à 100%, vous avez plus de docteurs que vous pensiez qu’il en existait dans le monde entier”, a-t-il raconté, amusé, en Pennsylvanie.
Il n’est pas certain que l’anecdote suffise à modifier l’impression tenace de près de 60% des Américains que leur président gère mal cette pandémie.
(AFP)